Stephen Clarke a déménagé en France en 1990 et, semble-t-il, ne s’attendait pas à devenir écrivain, et encore moins – auteur de best-sellers mondiaux, comme « God save la France! ». Cependant, il l’a fait, ainsi que de parler avec nous près du Canal Saint-Martin sur les Britanniques, les Français, la France et son histoire.
Un jour, j’ai décidé de passer de l’Albion brumeuse vers Paris non moins sombre. La raison de cela était mon travail complètement inutile, mais extrêmement stressant dans une maison d’édition, qui éditait les dictionnaires. La société appartenait à une grande média-holding , mais le budget qui lui était alloué a toujours été une pierre angulaire – parce que nous étions une source constante de pertes. Et peu importe que vous parliez couramment quatre langues, vous pourriez perdre votre travail à tout moment, et cela, bien sûr, n’ajoutait pas d’enthousiasme. Alors j’ai commencé à chercher quelque chose de nouveau, et lorsqu’on m’a offert un poste de journaliste à Paris, j’ai immédiatement accepté.
Si vous habitez en France, vous devez vivre à Paris. Sauf évidemment si vous êtes un paysan né. Après tout, en province, vous devez vous préparer au fait que tous les magasins sont fermés à midi, et le dimanche il y a un seul restaurant pour toute la ville, avec souvent pas la meilleure nourriture. Quand je suis fatigué de Paris, je ne vais pas au fin fond de la campagne française, mais je prends un train à la gare du Nord et je vais à Londres.
Le héros de beaucoup de mes livres est Paul West, pas tout à fait mon alter-ego. D’abord, il a 27 ans, l’âge auquel les rock stars meurent ou réussissent. Kurt Cobain, Jim Morrison et Janis Joplin sont morts à vingt-sept ans et Paul West a survécu. Il est une sorte de rock star survivante. Il est beaucoup plus jeune que moi et ne parle pas français du tout. Je comprends la France, lui non, et il se retrouve toujours dans des situations qui lui semblent anormales. Il n’est pas du tout contre les Français, ils sont simplement incompréhensibles et inexplorés pour lui. Il taquine les Français, se moque d’eux, mais ne les nie pas. Les Français sont très cruels les uns envers les autres, leurs politiques sont cruelles, initialement ils divisent les gens en droite et gauche et mènent entre eux une guerre inconciliable. Mon héros les traite avec un certain sarcasme, et les Français achètent avec plaisir mon livre – il semble, à ce jour, qu’il est vendu à deux millions et demi d’exemplaires. Et ce sont les Français qui me disent: « Tout est vrai, nous sommes comme ça. »
Certains m’appellent l’anti-Peter Mayle, je m’appelle l’antidote de Peter Mayle. Il écrit de beaux livres où les endroits sont merveilleux, le soleil brille toujours, les fleurs fleurissent, les villageois sont beaux et tout est extrêmement pittoresque. J’écris sur la vie quotidienne des gens ordinaires à Paris et les situations réelles. J’ai pensé à mon premier livre comme le contraire de « Un an en Provence » de Mayle, alors j’ai choisi le titre « Un an dans la merde » (en française « God save la France! » – NLDR). Paul West se retrouve dans la merde, marche dans la merde, crée la merde.
Nous – les Français comme les Anglais – mythifions notre histoire, nous créons des héros et nous les idéalisons, mais si l’on regarde les choses de façon réaliste, il n’y avait pas de héros idéaux, il y avait juste des gens qui ont changé l’histoire. Prenons l’exemple de Jeanne d’Arc, dont j’ai parlé dans mon livre « 1000 ans de mésentente cordiale » (l’original «1000 Years of Annoying the French» – NLDR) – ce sont les Français qui ont arrêté Jeanne et comme il était de coutume au temps de toutes les guerres, ils ont demandé une rançon pour elle en tant que personne importante. Le roi de France a eu toutes les possibilités de racheter Jeanne d’Arc, qui l’a aidé à monter sur le trône, mais il ne l’a pas fait, l’a trahie et abandonnée. Et c’est un Français, Pierre Cauchon, qui l’a jugée, puis l’a brûlée. Et en 1919, à la fin de la première guerre mondiale, où les Anglais, au juste, se sont battus au côté des Français, il fut décidé de la canoniser, et de présenter les Britanniques comme ses assassins. Donc – l’histoire n’est pas une chose simple et vous ne pouvez pas la prendre sans ambiguïté. Dans mes livres j’aime provoquer les gens, en leur révélant les détails de ce qu’ils savaient mais seulement d’un côté.