Qu’il y a t-il en commun entre le film culte russe « L’ironie du sort » et Roger Vadim ? Oui, les origines russes. Mais pas seulement. Tout comme le héros du film russe qui se trompe d’avion, Roger Vadim, après avoir réunis ses enfants issus des différents mariages et unions dans la maison de Jane Fonda, sa femme de l’époque, se trompe d’avion et, au lieu d’aller dans leur villes respectives Londres, Rome et Paris, ils se retrouvent tous au mauvais endroit !
Parce que l’on n’est pas russe pour rien ! Et de plus, selon la tradition familiale, un descendant de Gengis Khan! Roger Vadim est né en 1928 à Paris. Son père, Igor Nicolaevitch Plémiannikov, né à Kiev, vient d’une famille russe noble. Le nom Plémiannikov lui vient de son illustre oncle, l’Empereur mongol, qui a baptisé ainsi les familles de ses descendants puisque le mot russe « plemannik » signifie « neveu ». La belle vie de la noblesse russe est balayée par la Révolution bolchevique. Igor est encore adolescent lorsqu’il s’engage dans l’armée du général Wrangel pour combattre les rouges. C’est la défaite, l’arrestation et la condamnation à mort ! Mais la veille de son exécution Igor s’évade, fuit vers la Pologne, puis arrive en France. Il survit grâce aux quelques économies familiales puis joue du piano dans des bars de nuit.
Naturalisé français, il suit ses études à l’Institut des langues orientales, devient diplomate et il est nommé vice-consul de France en Égypte.
La mère de Roger Vadim, Marie-Antoinette Ardilouze est une provençale qui a grandi dans l’univers traditionnel d’une famille patriarcale dans le sud. En quête de la liberté et d’une novelle vie, Marie-Antoinette finit par « décrocher » un mariage avec un millionnaire belge mais la vie bourgeoise l’ennuie, elle divorce et monte à Paris. Elle rencontre Igor à l’Institut des langues orientales et tous les deux ils se mettent à construire cette nouvelle vie.
Ces deux personnalités hautes en couleurs ont donné la vie à Roger Vadim. Réalisateur, scénariste, acteur, romancier, poète, et surtout célèbre homme à femmes! Et pas n’importe lesquelles !
Son enterrement, le jour de la Saint Valentin, n’avait rien à envier au plus prestigieux tapis rouge du festival de Cannes. Et pour cause. Il a partagé la vie de Brigitte Bardot, d’Annette Stroyberg, de Catherine Deneuve, de Jane Fonda, d’Ann Biderman et de Marie-Christine Barrault – ses six femmes se sont retrouvées côte à côte, elles voulaient s’affirmer et prouver que chacune avant eu une place particulière dans la vie de Roger Vadim.
Brigitte. C’est en 1949 que Roger Vadim remarque Brigitte Bardot, elle n’a alors que 15 ans et c’est le coup de foudre réciproque entre eux dès la première audition. Les jeunes amoureux devront attendre les 18 ans de Brigitte pour pouvoir se marier. Mais la carrière cinématographique de la jeune Brigitte n’attend pas : son ami obtient pour elle une participation dans « Futures vedettes », réalisé par son mentor Marc Allégret (film dont il écrit l’adaptation et les dialogues), où la jeune fille trouble Jean Marais. Puis, il écrit deux scénarios qui contribuent grandement à imposer l’image de Brigitte Bardot comme d’une fille sexy mais sympathique : «Cette sacrée gamine», mis en scène par Michel Boisrond, et «En effeuillant la marguerite» d’Allégret.
Mais la consécration pour eux deux arrive avec le film devenu culte «Et Dieu… créa la femme» que Roger Vadim écrit et réalise pour son épouse en 1956. Dans ce film Brigitte Bardot joue presque son propre rôle, le rôle d’une jeune femme au sommet de sa beauté qui en use auprès des hommes du village de pêcheurs de Saint-Tropez où elle vit. Un parfum de scandale et d’interdit plane autour du film ce qui contribue grandement à son succès, mais le film a eu raison du couple. Sur le tournage déjà Brigitte Bardot tombe sous le charme de Jean-Louis Trintignant ce qui crée des tensions. Puis, le succès et la médiatisation de la vie de Roger et de Brigitte finissent par trop peser sur le couple et il explose. Toutefois, même après leur divorce, prononcé en 1957, ils feront bonne figure face aux cameras et Roger Vadim dirigera Brigitte Bardo encore dans quatre films jusqu’en 1973.
Anette. Toujours sur des plateaux de cinéma Roger Vadim rencontre sa deuxième épouse, l’actrice danoise Annette Stroyberg, devenue Annette Vadim. Comme à l’accoutumée, il essaye d’en faire une vedette et tourne avec elle, en 1960, «Les Liaisons dangereuses» mais le succès n’est pas au rendez-vous, tout comme le bonheur familiale malgré la naissance de la première fille adorée de Roger Vadim, Nathalie. Annette fait des va-et-vient, leur vie devient un enfer et ils divorcent.
Catherine. En 1961 le goût de Roger Vadim pour les femmes blondes au petit nez retroussé le mène tout droit vers Catherine Deneuve, rencontrée sur le tournage du film «Les Parisiennes ». Elle n’a alors que 17 ans, ils tombent amoureux en une soirée, et se mettent en ménage dont naitra un fils, Christian Vadim, en 1963. Catherine ne deviendra jamais Madame Vadim à cause du chantage d’Annette Stroyberg qui menaçait Roger de lui interdire de voir sa fille Nathalie s’il épousait Catherine. Toutefois, Catherine Deneuve est devenue la grande vedette du cinéma mondial. Mais son talent cinématographique ne suffit pas à rendre Roger Vadim heureux. Des années plus tard, il aurait déclaré : «Faire l’amour avec Jane Fonda, c’était comme ouvrir une bouteille de champagne, mais faire l’amour avec Catherine Deneuve, c’était comme étreindre un réfrigérateur…»
Jane. En 1964, Roger Vadim tourne aux Etats Unis et pour son film « La Ronde» il engage la ravissante Jane Fonda qui succombe à son charme. Ils se marient à Las Vegas puis rentrent à Paris et c’est là que la jeune épouse découvre que son marie est un «sex addict» à la libido insatiable. «La jalousie est un concept bourgeois, explique-t-il à sa troisième épouse. Si j’ai des relations sexuelles avec quelqu’un d’autre, ce n’est pas de la trahison, parce que je t’aime»…
Dans son autobiographie «Ma vie» publié en 2005, Jane Fonda raconte que son ancien mari aimait épicer les ébats conjugaux en invitant des prostituées louées chez Madame Claude ou même des filles de rencontre. «Cela m’a réellement fait du mal… J’avais l’impression que si je disais non, il m’abandonnerait, et je ne pouvais m’imaginer sans lui».
Pour Roger Vadim le cinéma et la vie du couple sont les vases communicants, il filme sa femme dans le « kitchissime » « Barbarella » qui élève Jane Fonda au rang de sex-symbol. On est en 1968 et le film tombe à pique dans ce climat du renouveau et de la liberté. Cette même année, Jane Fonda met au monde son premier enfant, une fille prénommée Vanessa. Mais cette nouvelle paternité n’assagit en rien Roger Vadim. Pour se consoler, Jane s’autorise à son tour des relations avec d’autres hommes avant de faire le récit détaillé de ses incartades à son mari : lasse des soirées alcoolisées et des parties à trois, elle rêve désormais de donner un sens à son existence, mais «Cette nouvelle Jane m’intéressait moins», a écrit de son côté Vadim. Tous deux s’éloignent progressivement et finissent par divorcer en 1972.
Elle avouera par ailleurs s’être inspirée des call-girls ramenées par Vadim pour composer son rôle dans «Klute», en 1972, qui lui a valu un Oscar.
Marie-Christine. En 1975, le suivant mariage de Roger Vadim avec Catherine Schneider n’aura pas plus de succès, ils divorcent deux ans plus tard. De cette union naîtra un fils prénommé Vania. Le ménage avec l’américaine Ann Biderman, sa cadette de 23 ans, n’aura duré que deux ans. De même, son remake de son propre film culte «Et Dieu créa la femme…» est un échec. Enfin, en 1990, à 62 ans, Roger Vadim trouve enfin la sérénité auprès de la comédienne Marie-Christine Barrault. C’est une relation apaisée et tendre. Marie-Christine sera à ses coté jusqu’à sa mort, suite d’un cancer, en 2000 à Paris. Roger Vadim repose au cimetière marin du village de Saint-Tropez à quelques mètres du rivage, face au golfe de Saint-Tropez et de «la Madrague», propriété de Brigitte Bardot.
Roger Vadim a été une sensation pour toute une génération. Il a été un homme de tous les excès, un homme de trop d’amour, de trop de désir, de trop de femmes, de trop d’enfants… C’est tout ce que l’on déteste, et tout ce que l’on veut vire ! Par sa vie et par son œuvre de 23 films, il a démontré que ce monde de plaisir était non seulement possible mais autorisé.
Son fils, Christian Vadim, disait : «le truc de papa était qu’il n’en avait pas ! Et si se truc magique, cette force qui lui ôtait tous les peurs et touts les doutes était tout simplement la sincérité»
Tous les photos: Redlist & PurePeople
Publié dans le magazine « 5ème République » №14 – abonnez-vous au magazine